RVLF et philosophie
Posté: 28 Sep 2013, 22:29
Un pote m'a fait suivre ça. Ça vient d'une de ses connaissances, journaliste et blogueur, Rafik Djoumi. C'est un peu complexe, mais intéressant !
Rafik Djoumi a écrit:J'te pourris ton film - Episode #05 - Retour vers le Futur
Retour vers le futur (1985) est l'histoire du "Réel" tel qu'il fut questionné et repensé par deux grandes figures de la science au XXème siècle : le Dr Sigmund Freud et Albert Einstein - représentés par les personnages du Dr Emmett Brown et de son chien Einstein.
Tous les enjeux du récit sont contenus dans la figure tripartite imaginée par Freud (le ça, le moi et le surmoi) et que Emmett Brown dessinera après son choc avec le "Réel" dans l'endroit le plus évidemment freudien de sa maison (il se cogne la tête sur la cuvette des WC). Cette figure tipartite devient le convecteur temporel qui, en assurant le voyage dans le temps, nous ouvre à tous les paradoxes inspirés par Einstein et développés au XXème siècle par la physique quantique. Ces paradoxes touchent dans le film à la structure familiale, par groupes de 3 (Marty, son père et sa mère - mais aussi l'effacement dans le "Réel" de Marty, de son frère et de sa sœur)
Ainsi, Marty McFly, adolescent paumé ("hors du temps" comme le disait l'affiche) et surtout individu aliéné dans son réel par une triple figure du Père (un père lâche, un proviseur hystérique, un jury musical qui l'ignore) décide de fuir ce "Réel" désillusionné (l'époque de la sortie du film) pour voyager vers un Passé fantasmé et virginal (les années 50, assimilables à un lointain souvenir lié à l'enfance), Passé fantasmé dans lequel la première chanson qu'il entendra est "Mr Sandman" (Mr l'Homme au sable, ou Monsieur le Marchand de sable). Dans cet univers fantasmé, Marty devient un Œdipe contrarié et prend littéralement la place de son père (en le poussant violemment hors du cadre - et il lui apparaîtra plus tard sous forme de vision fantomatique, en tant que Dark Vador, la figure du Père de sa génération des années 80). Et toujours en tant qu'Œdipe, il se fait bien évidemment séduire par sa mère.
Mais il reste néanmoins un Œdipe contrarié, puisque conscient de ce qui l'a mené à cet endroit. En conséquence, il ne deviendra pas aveugle comme le héros de la mythologie grecque (à ce titre, lisez attentivement l'étiquette posée sur le convecteur temporel). Son but n'est pas de se substituer au Père mais de ré-imaginer ses parents (son origine, sa genèse) afin de recréer à la source son "Réel", un Réel qui ne sera plus mécanique et déterminé (comme le suggère tout le long plan d'ouverture du film) c'est-à-dire un Réel qui ne soit pas déterminé par le comportement de la matière (physique quantique) ou par l'organisation préalable de son psychisme (Freud) mais uniquement sur la base d'un Désir.
"The Power of Love is a curious thing"...
PS : vous constaterez par ailleurs qu'à la toute fin du film, les deux parents n'ont toujours pas réalisé que leur fils Marty est le sosie parfait du jeune homme qui les a visités dans les années 50 - ce qui ne fait qu'appuyer le caractère fantasmagorique des réels traversés par le héros.
PS bis : on retrouve ces mêmes thèmes dans le roman de Robert Silverberg "Les Temps parallèles" (où le héros couche avec un ancêtre) et dans "La Machine à explorer le temps" de HG Wells (où le héros, tel Œdipe, rencontre un Sphinx)